Occlusion, neurocognition et neuroplasticité

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  • Publié le . Paru dans Réalités Cliniques n°1 - 5 mars 2020 (page 4-7)
Information dentaire

Il est admis que l’occlusion dentaire joue un rôle important pour la précision des traitements restaurateurs et prothétiques en vue d’obtenir des contacts bilatéraux pour le confort et la stabilité des maxillaires. Cependant, l’occlusion est un domaine aux multiples facettes qui doit être considéré au-delà du seul schéma occlusal déterminant les relations statiques et dynamiques entre les arcades dentaires ou la position des maxillaires, et être abordé dans un cadre plus large. Ce cadre élargi comprend la modulation de la stimulation somato-sensorielle du cerveau provenant des mécano-récepteurs dentaires et orofaciaux, l’interprétation consciente de cette stimulation par le patient et la neuroplasticité sensorimotrice. Ces mécanismes, davantage que le type d’occlusion et le schéma des contacts des reconstructions orales, déterminent finalement si un individu s’adapte ou pas à la perception orale et aux changements sensitivomoteurs consécutifs aux procédés de restaurations dentaires et aux autres types de traitements (prothétiques, chirurgicaux, orthodontiques…). Le but de cet article est ainsi de montrer qu’au-delà des critères habituels de stabilité de l’occlusion, la capacité individuelle de chaque sujet à une adaptation aux changements occlusaux est sous la dépendance de la neuroplasticité.

Occlusion, neurocognition and neuroplasticity

It is recognised that dental occlusion plays an important in the precision of restorative and prosthetic treatments with a view to obtaining bilateral contact for the comfort and stability in the maxilla. However, occlusion is a multifaceted area that is more than just the occlusal diagram determining static and dynamic relationships between the dental arches or the position of the maxilla; it must be addressed in a broader context. This expanded framework includes the modulation of somatosensory stimulation of the brain from dental and orofacial mechano-receptors, the patient’s conscious interpretation of this stimulation and sensorimotor neuroplasticity. These mechanisms, more than the type of occlusion and the pattern of contacts of oral reconstructions, ultimately determine whether or not an individual adapts to oral perception and to the sensory-motor changes resulting from dental restorative processes and other types of treatment (prosthetic, surgical, orthodontic, …). The aim of this article is therefore to show that beyond the usual criteria for occlusion stability, the individual capacity of each subject to adapt to occlusal changes is dependent on neuroplasticity.

Alors que la grande majorité des patients s’adaptent rapidement aux modifications de leur occlusion dentaire indépendamment de leur type d’occlusion, une minorité d’entre eux ne s’adaptent pas et se plaignent d’inconfort, de sensations altérées et de troubles moteurs. Certains peuvent développer une douleur chronique, même en l’absence de problèmes occlusaux évidents. Ces patients représentent un défi pour le dentiste qui a généralement reçu un enseignement biomédical, à savoir que les symptomes sont l’expression de problèmes physico-somatiques.

Étant donné que c’est souvent le cas, il est nécessaire de reconnaître que les symptômes ne sont pas toujours engendrés par des problèmes d’ordre somatique, mais peuvent résulter d’une interaction complexe entre des facteurs biologiques, psychologiques et sociaux. De ce fait, il faut considérer le patient dans sa globalité et pas seulement par l’agencement des dents et l’organisation des contacts dentaires. Sans cette prise de conscience, il est impossible de comprendre les patients qui ne s’adaptent pas, tels que ceux qui présentent une dysesthésie occlusale et une incompatibilité de leurs prothèses.

En dépit de l’importance qu’il y a à suivre des directives cliniques strictes lorsque l’on traite l’occlusion, les aspects précédents soulignent le fait que l’adaptation ou la non-adaptation dépend de facteurs autres que le type de reconstruction occlusale, c’est-à-dire des processus neurocognitifs et neurophysiologiques qui régulent la stimulation du système somatosensoriel afférent vers le cerveau à partir des mécanorécepteurs dentaires et orofaciaux. Dans ce contexte, il est important de différencier la sensation de la perception, deux processus distincts mais étroitement liés : la sensation renvoie à la perception d’un stimulus physique transmis par les organes sensoriels, c’est-à-dire le ressenti inachevé d’un stimulus, alors que…

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