Aux portes du mystère…

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  • Publié le . Paru dans L'Information Dentaire n°9 - 10 mars 2021 (page 82-85)
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Place des Vosges, la Maison de Victor Hugo a fait peau neuve et n’attend plus que le feu vert du printemps (on y croit) pour accueillir ses hôtes dans un cadre renouvelé avec autant d’inspiration poétique que d’ambition artistique. Très symbolique en ces temps de culture mise sous clé, l’ouverture de certaine porte, légendaire, au fin fond du musée, aère littéralement la visite et vient lui offrir le charme d’un inédit café-terrasse où il fera bon muser dès que les geôliers lui reconnaîtront les mêmes droits qu’à la supérette du coin. Musée, muser… ces mots ont été si violemment séparés que ce lieu est vraiment la Place Royale (qui l’a toujours abrité) pour fêter leur réunion le jour venu – ce « dès que possible » dont la date reste à ce jour un mystère. Avec l’espoir que ce sera à temps pour y voir l’exposition consacrée à un peintre étonnant voyageur, qui, préfigurant l’ethnographie, s’aventura aux confins mystérieux du monde pour révéler des us et paysages inconnus, spectaculaires dans le goût de l’époque romantique pour l’effroi et le sublime des périls tumultueux, mais attestant une démarche documentaire assez impressionnante d’audace. Il arrive pourtant que le tumulte le plus redoutable ne soit pas à rechercher aussi loin. Quand il est juste à la porte, par exemple…

Levée de scellés

A-t-elle fait rêver sous sa tenture, cette porte de la chambre de Hugo ! Car derrière – on l’a toujours su – se dérobe l’escalier complice de ses échappées nocturnes.

Mais seul l’imaginaire pouvait jusqu’ici en franchir le seuil : à l’orée même de la bouche d’ombre, à l’endroit et à l’instant précis où il touchait au mystère de ses révélations, le visiteur se cassait le nez. Il lui fallait, résigné, rebrousser chemin et redescendre les marches de la frustration par l’escalier de la respectabilité, non sans invoquer les mânes du poète pour que triomphe le génie du lieu et que s’ouvre l’issue commandée par l’esprit. Il faut croire à sa puissance : la table des architectes a tourné favorablement et dicté le message du bon sens ; à la faveur en effet du réaménagement du musée, il a été décidé de libérer de son verrou l’escalier de la nuit.

Si les scènes à la Fragonard qu’il desservait restent à jamais le secret du fripon, ce n’est pas sans frisson que l’on descend enfin les degrés interdits ; pour peu, on croirait entendre l’invite du spectre des Contemplations : « Faisons un pas de plus dans ces choses profondes (…) En deçà c’est la nuit, au-delà c’est le rêve (…) Avançons dans cette ombre et sois mon compagnon »*… Ce qui nous attend au bas des marches est en réalité une jolie surprise et une lumineuse idée : c’est sur un jardin nouvellement créé que débouche désormais ce parcours intelligemment repensé. Certes, ce n’est pas le « radieux paradis », « profond, mystérieux »** qu’était pour Hugo le jardin des Feuillantines de son enfance, ni le hallier sauvage et caché de la rue Plumet des Misérables, mais une cour arborée de 300 m² qui fait quand même écho à ces lieux clos, à ces refuges à l’abri des regards qu’affectionnait le poète et qui, dans son œuvre comme dans sa vie, respirent…

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