Les peintres préfèrent les rousses
Leur métier c’est la couleur, et laquelle fait mieux chanter les bleus, les violets, les mauves, les verts, les noirs, les ivoires, les sables ? Regardez Botticelli, Giorgione et Titien, Courbet, Mucha et Klimt… Tous font ruisseler sur les épaules blanches cet or fauve qui fusionne idéalement feuillages et chevelures. L’Alsacien Jean-Jacques Henner (1829-1905) l’a si bien compris qu’il s’en est fait une spécialité, poursuivant à l’infini son motif de prédilection – qu’on pourrait titrer génériquement « naïade rousse couchée sur l’herbe près de l’eau turquoise au creux des bosquets d’ombre ». Henner voyait du roux partout, pensait roux, respirait roux. Pourquoi tant de roux, qu’exprime cette couleur et qu’implique de la porter ? C’est une question à plusieurs étages, comme cet hôtel particulier de la Plaine Monceau où chaque pièce apporte un élément de réponse, à travers la peinture (Henner et quelques contemporains), la littérature, la photographie, l’art indien et océanien, la bande dessinée, les jouets, la publicité, la mode et la parole des intéressés, au premier chef.
Les mystères de la toison d’or
L’héroïsme des roux sur le divan
Les déesses, reines, fées, égéries, pasionarias, aventurières et autres femmes pirates sont rousses. Tintin, Spirou, Peter Pan sont roux. Depuis les contes de l’enfance s’entretient dans l’imaginaire collectif une ambivalente légende autour de la rousseur, fatal fanal. Côté doré elle distingue, pare, auréole de prestige et désigne pour un destin de lumière l’être qui a la chance de s’en voir couronné. Côté sombre, elle stigmatise, met à part, accable et peut vouer à l’enfer qui a la disgrâce d’en être entignassé. Les racines de ces préjugés discriminants sont aussi anciennes qu’inexpliquées, sinon par la simple rareté des roux : 2 à 3 % de la population mondiale.
De Jean-Jacques Henner à Sonia Rykiel
Musée Henner
43, avenue de Villiers, Paris 17e
Jusqu’au 20 mai
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