Quand la passion de l’implantologie résonne à Lyon…

  • Publié le . Paru dans L'Information Dentaire
Information dentaire
L’édition 2018 des traditionnelles printanières de la société Global D a pris ses quartiers à la Cité Internationale les 21, 22 et 23 mars à Lyon, sous les présidence et modération des Drs Carole Leconte, Emmanuel Pontonnier, Eric Schneck, Pietro Felice, Philippe Roche-Poggi et du Pr Gilberto Sammartino. L’évènement est l’occasion de réunir la profession autour de l’implantologie et d’échanger à propos d’une vaste question : est-il temps de repenser la discipline ou d’envisager un retour aux fondamentaux ? Entre chirurgie en direct, conférences et débats parfois passionnés, tout le monde s’est finalement mis d’accord lors de la soirée dégustation au Ninkasi.

Pour ouvrir les trois jours de conférences, le Docteur Courtois a proposé une chirurgie en direct d’une grande maîtrise : la prise en charge d’un maxillaire supérieur atrophié. Afin de traiter un défaut osseux en épaisseur dans la partie antérieure et à la fois vertical et horizontal dans la zone postérieure, il a entrepris un vaste programme :
– sinus lift d’abord latéral, comblement avec de l’aPRF puis un mélange iPRF et particules osseuses (sticky bone) ;
– positionnement stabilisé par minivis d’un bloc cortico-spongieux allogénique en regard de la fenêtre d’accès ;
– technique de splitting à l’aide du piezotome dans la partie antérieure, bloc d’os spongieux intercalé sous la corticale ;
– recouvrement au sticky bone sur l’ensemble des greffes ;
– positionnement d’une large membrane d’aPRF soigneusement préparée par le Docteur Choukroun ;
– traction pédiculée de la boule de Bichat ;
– fermeture berge à berge du lambeau.
La chirurgie a été l’occasion d’aborder des points clés comme la brush technique (brossage des fibres du périoste pour donner de la laxité au lambeau) ou encore les points de suture selon la technique de l’apical mattress afin d’éviter toute traction du lambeau.

Le lendemain, le Docteur Konstantinos Valavanis a eu l’honneur de débuter la journée en établissant un parallèle entre les techniques de prothèse conventionnelle et celle de l’implantologie orale esthétique. Une série de cas cliniques a été présentée, articulée autour du même triangle d’or défini par le tissu osseux, muqueux et la prothèse. Chaque traitement doit être dicté par un projet prothétique validé par un mock up pour que le patient et le praticien soient en accord sur la finalité du traitement. Si le volume osseux n’est pas suffisant pour implanter selon l’axe prothétique, une solution intéressante permet de gérer les situations intermédiaires : un tournevis non rigide qui permet de visser en étant légèrement courbé, préservant ainsi l’épaisseur de céramique au niveau du bord incisif.
 
Lors de la conférence suivante, le Docteur Choukroun a proposé de changer tout ou presque dans les protocoles chirurgicaux. Un sujet polémique propice aux débats animés ! Il faut recentrer les priorités en chirurgie : éviter le stress oxydatif, favoriser l’angiogenèse et le maintien de la vascularisation. Plusieurs éléments permettent ces résultats et augmentent le taux de succès : la préparation biologique du patient (bilan sanguin, supplémentation en vitamine D), l’utilisation de PRF et des techniques chirurgicales atraumatiques comme la brush technique du périoste ou encore l’apical mattress.
 
Les nouvelles approches techniques et biologiques pour la fiabilisation des greffes osseuses péri-implantaires ont été traitées par le Docteur Surmenian. La pression excessive entraîne un échec de l’angiogenèse, il faut donc interdire de porter une prothèse amovible sur un site greffé. L’autre point essentiel est de vérifier si le patient « est capable de faire de l’os » et donc d’établir le bilan du cholestérol LDL et de la vitamine D. Le meilleur greffon reste celui d’origine humaine, l’utilisation de sticky bone (iPRF associé aux particules osseuses) permet une très bonne stabilisation de la greffe. Il est impératif de libérer les tensions du lambeau, notamment en secteur postérieur mandibulaire en décollant jusqu’au mylo-hyoïdien en lingual en combinant la technique de brushing du périoste. Pour stabiliser les greffes, l’utilisation de plaques d’ostéosynthèse en titane semble être la technique de choix. La clé de la fiabilisation est de comprendre que la biologie n’est pas négociable.
 
Pour finir la matinée, le Docteur Philippe Russe a partagé des cas de transposition du nerf alvéolaire inférieur (NAI), avec un recul de plus de vingt ans. Cette chirurgie trouve son indication dans les situations d’édentement postérieur avec une hauteur d’os supra canalaire faible. Elle entre en compétition avec les régénérations osseuses guidées (ROG), les implants courts ou encore les « all on four ». Elle est particulièrement indiquée dans les cas de perte osseuse faisant suite aux péri-implantites ou à un cancer. Le principe est de retirer un volet osseux latéral, d’accéder au canal et de transposer le nerf hors de son logement pour permettre de positionner des implants qui émergent dans le canal dans le même temps chirurgical. Les nombreux cas cliniques et surtout le suivi des patients à plus de vingt ans prouvent que la technique est fiable, mais nécessite une très grande maîtrise chirurgicale afin de limiter les risques de troubles neurologiques dans le secteur du NAI.
 
Pleine d’énergie, le Docteur Benhamou a assuré la tâche de relancer les conférences de début d’après-midi en discutant des réalités cliniques des régénérations osseuses dans le secteur antérieur. Le succès réside dans le concept de la chirurgie unique qui allie cinq points clés : respect du timing du placement de l’implant, chirurgie minimale invasive, positionnement 3D (émergence cingulaire) et stabilité primaire optimale, toujours réaliser une ROG et enfin procéder systématiquement à un conjonctif enfoui. Ces points sont à adapter en fonction d’une classification élaborée par le Docteur Benhamou, qui différencie les alvéoles cicatrisées, les alvéoles intactes, les sites avec fenestration et pour terminer les déhiscences osseuses.
 
La clé du succès de la stabilité des tissus péri-implantaires à long terme a été présentée par le Docteur Lecloux. Il est impératif de se concentrer sur toutes les étapes de l’implantologie, du projet à la pose de la prothèse en passant par la chirurgie, mais également à la maintenance. Il ne faut négliger aucune étape. Il faut soigner les tissus mous, le maintien de la gencive kératinisée est capital, le concept de « one time, one abutment » semble préserver au mieux le parodonte. Enfin, l’occlusion est un facteur à ne pas négliger.
 
Le Docteur Bonner est venu du Canada pour révolutionner notre vision de la parodontite et a fortiori de la péri-implantite. Il faut revenir aux fondamentaux de la médecine pour comprendre la physiopathologie et cela passe par l’utilisation du microscope. C’est un outil merveilleux, aussi bien pour le diagnostic que le suivi de l’évolution de la maladie, mais également pour la compréhension par le patient des processus impliqués dans l’alvéolyse et favoriser sa prise en charge. Si un biofilm sain présente seulement des coccis, des filaments et des cellules épithéliales, un biofilm de gingivite grouillera de spirochetes, vibrions, bacilles et quelques leucocytes. En plus de cela, on peut identifier une amibe, entamoeba gingivalis, qui phagocyte le noyau des globules blancs et qu’il est impératif d’éradiquer pour retrouver un parodonte sain.
 
Le Docteur Pistilli a clos la journée en discutant des augmentations verticales et horizontales des crêtes. Vingt-cinq ans de pratique de l’implantologie sont l’occasion de partager son expérience des greffes osseuses. Si les techniques de prélèvement pariétal, dangereuses et éprouvantes, n’ont plus leur place dans la discipline, il est impératif de réfléchir au choix du biomatériaux. Alors que la xénogreffe pure ne semble pas être la technique de référence, l’allogreffe, quant à elle, offre de belles perspectives.

Le dernier jour du congrès, le Docteur Sabouni a été le premier à prendre la parole, sur le thème de l’orthodontie et de son apport dans les traitements implantaires. L’occasion de présenter un grand nombre de cas cliniques, traités par Invisalign, un système de gouttière permettant une prise en charge confortable et esthétique sans sacrifier la rapidité du traitement. Il est capital de bien communiquer entre orthodontiste, chirurgien maxillo-facial et chirurgien-dentiste, cela afin d’optimiser les résultats esthétiques et fonctionnels d’un plan de traitement global. On peut également envisager de positionner un implant avant les mouvements orthodontiques pour s’en servir d’ancrage puis de soutien prothétique si le traitement est correctement planifié.
 
Les Docteurs Bolle et Chapotat se sont ensuite intéressés à une problématique centrale de la discipline : la péri-implantite. Ils ont présenté les résultats d’une étude expérimentale évaluant l’influence de la conception implantaire sur les réactions tissulaires péri-implantaires lors d’une inflammation induite. Des coupes histologiques et des radiographies ont permis de mesurer la perte osseuse en fonction de la morphologie du col implantaire. Les résultats préliminaires de cette étude semblent montrer que le design du col pourrait jouer un rôle en tant que facteur favorisant dans l’étiologie de cette pathologie.
 
De nombreuses innovations ont vu le jour en termes de reconstruction pré-implantaire, le Professeur Federico Hernandez-Alfaro a proposé une revue des différentes techniques à envisager. Faisant preuve d’une grande précision dans la prise en charge des défauts osseux, il a exposé un arbre décisionnel en fonction du type d’atrophie. Il associe ainsi des biomatériaux à de l’os autogène et adopte préférentiellement des techniques peu invasives.
 
C’est avec beaucoup de précisions que le Docteur Vo Van Nhân a abordé le thème de la prise en charge des perforations de la membrane sinusienne. Illustrés de cas cliniques, il a pu rappeler les fondamentaux pour éviter cette complication classique, mais il a surtout su détailler le protocole de prise en charge. En respectant les trois clés du succès : des sutures sans tension, une aiguille de section ronde et enfin un fil 6.0 mono­filament résorbable, il est possible de pallier cet incident et de finir la chirurgie en posant l’implant et en gagnant de nombreux mois de cicatrisation.
 
Pour clôturer cette session 2018 des Printanières, trois intervenants, les Docteurs Poiroux, Le Pautremat et Seris, ont proposé de discuter des avancées en implantologie aux cours de ces 30 dernières années et de leurs incidences sur la vie du cabinet. La communication entre tous les acteurs du cabinet est le point clé d’une activité efficace et sereine. Cela peut passer par les services d’un coordinateur chargé de faire le lien entre les correspondants, l’implantologue, les patients, le prothésiste et les industriels.
Un point, parmi beaucoup d’autres, à approfondir lors des prochaines rencontres organisées par Global D !
 
Franck Bézu, Thomas Fortin

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