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Information dentaire

L'Information Dentaire n°35 - 12 octobre 2022

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Avant-propos

Le chirurgien-dentiste est-il un pollueur ? I Lire ci-dessous
Par Michèle Reners, Alice Baras, Michèle Muller-Bolla

Actualités

Verres ionomères et prévention carieuse
Pascal De March

Presse médicale spécialisée
Philippe Léonard

Actualité hebdo
Nicolas Fontenelle

Pré-adf : Restaurations et prothèses pédiatriques pour l’omnipraticien

Formation

Estimation quantitative de l’ostéointégration des implants dentaires
Emmanuel Gouët

Des tumeurs bénignes de la muqueuse buccale
Jean-Christophe Fricain, Jacky Samson

Ressenti du patient après une chirurgie orthognathique
Alexie Culiez, Pauline Boucher

Idplus – Écoresponsabilité

Quels sont les dentifrices les plus adaptés à la prévention de la maladie carieuse ?
Michèle Muller-Bolla, Thomas Trentesaux

Une hygiène bucco-dentaire sans déchet, est-ce possible ?
Michèle Muller-Bolla, Thomas Trentesaux

Le zéro déchet au cabinet, entre utopie et bon sens écologique
Thomas Trentesaux, Alice Baras, Michèle Muller-Bolla


Avant-propos

Le chirurgien-dentiste est-il un pollueur ?

Du fait des événements écologiques de plus en plus fréquents, les médias nous alertent régulièrement sur le dérèglement climatique à l’origine de la détérioration de la planète. Certains y sont très sensibles, alors que d’autres l’ignorent, soit par manque d’informations, soit parce qu’ils ne se sentent pas concernés. Pourtant, même si les industries influencent énormément notre environnement, chacun peut également jouer un rôle à son niveau et adopter une attitude plus responsable en matière d’écologie.

À l’Id, nous sommes très sensibles à ce thème de l’écoresponsabilité, comme le montre ce numéro qui vous propose trois articles écrits par le Pr Muller-Bolla et le Dr Trentesaux, rejoints pour l’un d’eux par le Dr Alice Baras, qui nous fait le grand plaisir d’animer une rubrique régulière sur ce thème dans nos pages, et a accepté de répondre à quelques questions.

Le chirurgien-dentiste est-il un gros pollueur ?
Les activités de santé sont globalement polluantes. L’impact carbone du système de santé a été estimé récemment à hauteur de 6 à 8 % des émissions de gaz à effet de serre nationales par le think tank The Shift Project. Ces émissions sont principalement générées par les achats des produits de santé et les transports des personnes. L’activité menée en cabinet dentaire participe à ces émissions et à la consommation des ressources. La spécificité des activités qui y sont menées amplifie l’empreinte écologique moyenne, notamment par l’usage de nombreux matériaux, consommables et produits chimiques dans le cadre des soins, de la gestion du risque infectieux, notamment via le développement de l’usage unique et de l’usage de biocides chimiques.

Quelles sont les habitudes majeures et faciles à mettre en place à changer pour être plus respectueux de l’environnement dans notre pratique quotidienne ?
Pour maîtriser notre impact environnemental de manière efficace, il est indispensable d’avoir une vision globale de l’impact généré par notre activité. Observer les flux entrants et sortants et arbitrer ce qui a le plus d’impact, ce qui est indispensable pour notre activité, ce qui est superflu ou futile.

Le tri des déchets ou la réduction de leur volume est souvent le starter d’une démarche écologique, que ce soit dans la vie privée ou professionnelle. Mais les déchets sont la partie émergée de l’iceberg de notre empreinte écologique. Mieux les gérer est une étape importante, mais elle ne suffira pas pour répondre aux enjeux actuels. La démarche doit être globale, intégrer la sobriété énergétique, numérique, réduire les transports carbonés, maîtriser le risque chimique des produits de santé avant, pendant et après les soins. La bonne nouvelle est que tout est lié. En commençant par une démarche de réduction des déchets, on s’interroge sur les achats, sur la pollution de l’air, de l’eau, des sols par exemple.
La démarche nécessite d’être intégrée de manière transversale à la gestion du cabinet, d’avoir accès à des informations basées sur des données probantes, sans greenwashing, et d’avoir une approche positive, de voir les bénéfices que cela génère !

La démarche écoresponsable doit s’appuyer sur la prévention et la promotion de la santé bucco-dentaire qui sont encore trop peu soutenues, tant d’un point de vue économique par leur prise en charge que dans la pratique quotidienne par méconnaissance de leur intérêt sur la santé par opposition à l’hypertechnologisation des soins. La plupart des pathologies orales sont évitables, les prévenir permet de maîtriser la demande de soins.

Le chirurgien-dentiste doit-il se protéger au sein du cabinet dentaire ?
Oui, les chirurgiens-dentistes et les assistantes dentaires doivent savoir qu’ils sont reconnus comme étant des professions à risque d’exposition aux risques chimiques représentés par l’exposition aux perturbateurs endocriniens ou aux agents chimiques dangereux, notamment les substances cancérogènes, mutagènes, reprotoxiques (CMR). Il est nécessaire de savoir les repérer, d’intégrer une démarche de réduction de ces expositions et de protection individuelle et collective de l’équipe.

La démarche écologique présente ce co-bénéfice : intégrer une démarche de sobriété chimique est meilleur pour l’environnement et meilleur pour notre santé.

Est-il urgent de réagir ?
La démarche écologique est une urgence vitale. Que ce soit les experts du GIEC, de l’IPBES, de l’OMS… leurs observations sont sans équivoque, l’empreinte écologique humaine entraîne des changements environnementaux globaux catastrophiques pour le vivant. Les conditions de vie et de bien-être sont compromises. Pour reprendre les mots d’Hubert Reeves : « Nous menons une guerre contre la nature, si nous la gagnons nous sommes perdus. » Il est urgent d’intégrer une double stratégie d’adaptation à ces changements déjà observables, et d’atténuation de notre empreinte écologique afin de les maîtriser.

Le cabinet du futur sera-t-il plus écoresponsable ?
Ce n’est pas à moi d’en décider. C’est une nécessité, à nous d’agir – ensemble – pour que cela devienne une réalité ! Chaque geste compte et chaque acteur de la filière dentaire a un rôle à jouer.
Informer notre équipe et nos patients, adapter notre pratique, sensibiliser nos fournisseurs sont autant d’actions éco-responsables permettant d’intercepter la détérioration de la planète en étant un chirurgien-dentiste le moins pollueur possible.

Michèle Reners
Rédactrice en chef

Alice Baras
Docteur en chirurgie dentaire
spécialisée dans la formation à l’écoresponsabilité

Michèle Muller-Bolla
PU-PH, Université Côte d’Azur
Coordinatrice du dossier Id+ « Zéro déchet »