La réforme du temps partiel

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  • Publié le . Paru dans L'Information Dentaire (page 38-40)
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Au cours de l’année 2013, les réformes dans le domaine social se sont succédé à un rythme soutenu : Crédit d’Impôt Emploi Compétitivité (CICE), contrat de génération, prévention des risques professionnels, réforme des retraites… La loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi comporte des mesures ambitieuses pour lutter contre la précarité et faciliter l’accès au travail. Les dispositions concernant le temps partiel modifient en profondeur le droit du travail et suscitent de nombreuses interrogations.

Le travail à temps partiel s’est régulièrement développé depuis les années soixante-dix, notamment dans le commerce et la distribution, l’hôtellerie, la restauration et les services. L’absence de lisibilité économique et la recherche de flexibilité ont également conduit les employeurs à recourir au temps partiel. Pour lutter contre la précarité, le législateur a prévu de nombreuses dispositions afin de limiter le recours abusif au temps partiel (nécessité d’un contrat de travail écrit comportant la répartition des heures hebdomadaires, priorité pour un poste à temps complet, limitation des heures complémentaires…). Il en résulte un important contentieux entre employeurs et salariés. La loi de sécurisation de l’emploi a pour objet de réformer en profondeur les règles actuelles, en luttant notamment contre le temps partiel subi et en introduisant plus de souplesse pour les employeurs.

Instauration d’une durée minimale de travail de 24 heures par semaine

La durée minimale de travail hebdomadaire des salariés à temps partiel est fixée à 24 heures (sauf dérogations) ou, le cas échéant, à l’équivalent mensuel de cette durée, soit 104 heures. Initialement prévue au 1er janvier 2014, la date d’entrée en vigueur de cette obligation vient d’être reportée au 1er juillet 2014 par décision du ministère du Travail. Cette période transitoire devrait permettre aux organisations syndicales de finaliser les accords par branche en assouplissant le dispositif.

Cette durée du travail concernera l’ensemble des salariés à temps partiel à l’exclusion des employés de maison.

Dérogations

La loi en prévoit trois.

• Dérogations de plein droit

– Pour les jeunes de moins de 26 ans poursuivant
leurs études.

– Pour les salariés des entreprises de travail temporaire d’insertion et des associations intermédiaires lorsque
leur parcours d’insertion le justifie.

• Dérogation par accord de branche étendu

Une convention ou un accord de branche étendu peut fixer une durée de travail inférieure à la durée de 24 heures,
à condition de prévoir des contreparties pour les salariés, notamment la mise en œuvre d’horaires réguliers ou permettant de cumuler plusieurs emplois afin d’atteindre une durée globale d’activité correspondant à un temps plein.

L’obligation de regrouper les horaires de travail du salarié sur des journées ou des demi-journées régulières ou complètes sera nécessaire pour obtenir la dérogation.

• Dérogation sur demande du salarié

Sur demande écrite du salarié, il sera possible de déroger
au plancher de 24 heures hebdomadaires. La demande devra être motivée par le salarié pour faire face
à des contraintes personnelles ou pour cumuler plusieurs activités afin d’atteindre une durée globale correspondant
à un temps plein ou au moins égal à 24 heures.

L’employeur devra regrouper les horaires de travail
du salarié sur des journées ou des demi-journées régulières ou complètes.

Pour éviter toute remise en cause de la dérogation
ou requalification du contrat en temps complet, l’employeur devra disposer de la demande de dérogation
« écrite et motivée » du salarié.

Entrée en vigueur

Les dispositions relatives à la durée minimale de travail entreront en vigueur le 1er juillet 2014.

Il convient de distinguer deux situations :

– les nouveaux contrats conclus à compter du 1erjuillet 2014 : ils devront respecter la durée minimale de 24 heures par semaine sauf dérogations ;

– les contrats en cours au 1er juillet 2014 : ils ne seront soumis à ces règles qu’à compter du 1er janvier 2016. Cependant, la loi indique que le salarié peut, en l’absence d’accord de branche dérogatoire, demander que sa durée de travail soit d’au moins 24 heures, entre le 1er juillet 2014 et le 31 décembre 2015. Toutefois, l’employeur pourra refuser, en motivant sa décision « par l’impossibilité d’y faire droit compte tenu de l’activité économique de l’entreprise ».

La notion d’activité économique n’a pas été précisément définie, mais paraît plus large que celle de difficulté économique. Ce qui devrait permettre à l’employeur de refuser la demande du salarié en l’absence de toute difficulté économique.

En revanche, au 1er janvier 2016, sauf dérogations, tous les contrats à temps partiel devront avoir une durée minimale de 24 heures.

Majoration des heures complémentaires

• Majoration de 10 %

À compter du 1er janvier 2014, toutes les heures complémentaires réalisées dans la limite du dixième de la durée contractuelle devaient être majorées de 10 %. Malgré l’absence de précision du communiqué ministériel, cette majoration ne devrait s’appliquer qu’à compter du 1erjuillet 2014.

Jusqu’à présent, les heures complémentaires ne faisaient l’objet d’aucune majoration, sauf disposition conventionnelle contraire.

• Majoration de 25 % ramenée à 10 %

Si un accord collectif, de branche ou d’entreprise, prévoit que le salarié peut effectuer un tiers d’heures complémentaires, la loi indique qu’un accord de branche étendu pourra fixer un taux de majoration de ces heures différent du taux légal de 25 %, dans la limite de 10 %. Actuellement, quand les heures complémentaires sont portées au tiers, le taux de majoration ne peut être inférieur à 25 %.

Avenant de compléments d’heures

La loi précise qu’une convention ou un accord de branche étendu pourra prévoir la possibilité d’augmenter temporairement la durée du travail du salarié à temps partiel, par avenant au contrat de travail avec l’accord du salarié.

La convention ou l’accord devra déterminer le nombre d’avenants pouvant être conclus dans la limite de huit par an et par salarié (hors les cas de remplacement) et les modalités selon lesquelles les salariés bénéficieront des compléments d’heures en priorité.

Une majoration salariale des heures effectuées pourra être accordée, en l’absence de précisions elles seront rémunérées au taux normal.

A contrario, les heures complémentaires accomplies au-delà de la durée prévue par l’avenant de « compléments d’heures » donneront lieu à une majoration minimale de 25 %.

En pratique les employeurs ne pourront y recourir qu’après la conclusion et l’extension de la convention ou l’accord de branche.

Un employeur qui augmenterait temporairement la durée du travail d’un salarié à temps partiel risquerait, en cas de litige avec le salarié, une requalification du contrat en temps plein.

À travers ces dispositions, le législateur souhaite apporter de nouvelles garanties aux salariés en leur accordant une durée minimale de travail significative, une meilleure indemnisation des heures complémentaires et des répartitions du temps de travail régulières. Pour les employeurs, de nombreuses interrogations demeurent : comment recruter un salarié pour une durée inférieure à 24 heures en l’absence d’accord de branche ? Que se passera-t-il lorsqu’un salarié effectuant moins de 24 heures demandera à passer à 24 heures à compter du 1er janvier 2016 ?

Malgré quelques assouplissements très encadrés, ces mesures contribuent à complexifier la réglementation du travail et à accentuer le climat d’insécurité juridique avec le risque de générer de nouveaux contentieux ou de décourager les velléités d’embauche.

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