Quelle est la situation des soignants libéraux français en termes de santé au travail et de conditions d’exercice de leur métier ? L’association Soins aux professionnels de la santé (SPS) et Doctolib ont interrogé en mars dernier 1 269 libéraux (76,5 % de femmes, âge moyen 44 ans). 131 chirurgiens-dentistes y ont répondu.
L’enquête, publiée le 21 juillet, confirme une réalité préoccupante : la charge administrative, la violence et la fatigue chronique affectent l’équilibre professionnel et personnel des praticiens.
Pour 55 % des soignants, les tâches administratives prennent « souvent », voire « tout le temps », une place excessive, au détriment des soins. Dentistes et médecins généralistes se disent les plus impactés, suivis par les spécialistes et kinésithérapeutes. Réglementation, traçabilité, CMU, comptabilité et finances, dossiers patients, comptes rendus… Pour 50 % des chirurgiens-dentistes et 45 % des généralistes, « les tâches administratives et normes sont perçues en permanence comme des freins à la conduite de l’activité ».
Autre constat alarmant : la violence envers les soignants libéraux se banalise. Menaces, agressions verbales (41 %), voire physiques (6 %), vols et actes de vandalisme rythment le quotidien de nombreux praticiens. Ces violences touchent particulièrement les généralistes, les dentistes et les kinésithérapeutes. Leurs conséquences sont lourdes : stress, anxiété, perte de motivation, sentiment d’insécurité. Et plus de 70 % des victimes ne portent pas plainte, ce qui sous-estime l’ampleur du phénomène.
L’impact psychologique de ces situations est manifeste. Un quart des médecins généralistes et des dentistes déclarent être confrontés à un burn out critique. Au total, 18 % des soignants ont déjà reçu un diagnostic formel de burn out et 19 % un diagnostic de dépression. La fatigue est généralisée : 60 % se disent épuisés par leur activité et 63 % « usés » en fin de journée. Et seuls 17 % parviennent à maintenir une frontière claire entre vie professionnelle et personnelle.
A cette usure s’ajoute une insatisfaction économique : 67 % jugent leurs revenus insuffisants au regard de leurs qualifications et responsabilités (45 % pour les chirurgiens-dentistes).
Face à cette situation, SPS propose de mettre en place, outre un accompagnement territorialisé au plus proche des professionnels de santé, y compris des forces de l’ordre, un bilan de santé tous les trois ans. « Les soignants libéraux ont tendance à minimiser ce qui leur arrive ou à reporter à plus tard, c’est la cause des chiffres alarmants qu’on observe, souligne l’association. Ce rendez-vous périodique leur apporterait un avis objectif sur leur état de santé physique et mentale, et les inciterait à prendre davantage soin d’eux. »
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