L'Information Dentaire n°32 - 24 septembre 2025

Usure dentaire pathologique : de la prévention à la prise en charge

L’usure dentaire est un phénomène naturel, le plus souvent physiologique. Cependant, elle prend de plus en plus fréquemment une forme pathologique, avec des répercussions fonctionnelles, esthétiques et parfois douloureuses. Les mécanismes en cause sont complexes, synergiques et souvent difficiles à identifier, ce qui en fait un véritable défi diagnostique et thérapeutique.

Si les descriptions des lésions d’origine chimique et mécanique remontent à plusieurs siècles, leur reconnaissance en tant qu’enjeu clinique majeur est plus récente. Aujourd’hui, nous disposons de critères permettant de distinguer l’usure physiologique de l’usure pathologique [1]. Pourtant, les stratégies de prévention – qu’elles soient primaires, secondaires et tertiaires – peinent encore à s’imposer dans la pratique quotidienne. Trop souvent, la restauration intervient en dernier recours, signant l’échec de la prévention primaire.

La prise en charge de l’usure pathologique doit commencer par une analyse rigoureuse : forme et localisation des lésions, facteurs de risque associés (alimentation acide, reflux gastro-œsophagien, bruxisme lié au sommeil, brossage traumatique, troubles des conduites alimentaires). Lorsqu’une restauration devient nécessaire, elle doit respecter les mécanismes de compensation dento-alvéolaires, intégrer une réflexion sur la dimension verticale d’occlusion et s’inscrire dans une démarche raisonnée, fondée sur le principe de balance bénéfice/risque.

Ce numéro spécial propose une vision d’ensemble, depuis les bases historiques et définitionnelles jusqu’aux avancées cliniques et technologiques les plus récentes. Les contributions rassemblées ici émanent d’équipes nationales et internationales de premier plan, témoignant de la dynamique collaborative qui caractérise aujourd’hui la recherche et la pratique clinique autour de l’usure dentaire. L’apport de l’intelligence artificielle, présenté en perspective, ouvre par ailleurs des voies prometteuses pour un diagnostic plus précoce, plus fiable et plus personnalisé, ainsi qu’une prise en charge mieux adaptée aux besoins des patients.

Nous espérons que cette diversité de points de vue et d’expériences enrichira la compréhension de ce phénomène désormais au premier plan de la dentisterie contemporaine, et qu’elle offrira aux praticiens comme aux étudiants des repères concrets pour orienter la prévention et affiner leurs prises en charge.

Nous remercions chaleureusement l’ensemble des auteurs pour leurs contributions et espérons que ce numéro nourrira vos réflexions et inspirera votre pratique quotidienne, au service de la santé et du bien-être des patients.

Emmanuel d’Incau et Olivia Kérourédan, Coordinateurs scientifiques du numéro

1 Loomans B, Opdam N, Attin T, Bartlett D, Edelhoff D, Frankenberger R, Benic G, Ramseyer S, Wetselaar P, Sterenborg B, Hickel R, Pallesen U, Mehta S, Banerji S, Lussi A, Wilson N. Severe Tooth Wear: European consensus statement on management guidelines. J Adhes Dent 2017;19(2):111-9.