S’installer en Polynésie Française pourquoi pas ?

  • Publié le . Paru dans L'Information Dentaire (page 36-38)
Information dentaire
Une installation n’est jamais le fruit du hasard, d’autant plus lorsqu’elle est envisagée en Polynésie.
Une réflexion en amont est nécessaire.
Quelles sont les questions à envisager ?
Où trouver les réponses ?
Existe-t-il un guide ?
Autant d’interrogations explorées dans cet article issu d’une thèse d’exercice de Docteur d’État en chirurgie dentaire.

La protection sociale est-elle identique à celle de Métropole ?
Les soins dentaires sont-ils remboursés ?
Si oui, comment ?

La Sécurité sociale de Métropole n’est pas présente en Polynésie. La protection sociale généralisée y est assurée par la Caisse de Prévoyance Sociale (CPS) qui couvre aujourd’hui plus de 99 % de la population de la Polynésie Française, car elle est obligatoire pour les résidents [1].
Il existe une convention entre la CPS et les chirurgiens-dentistes libéraux. La nomenclature en vigueur est la Nomenclature Générale des Actes Professionnels (NGAP), les actes opposables sont remboursés à 70 % par la CPS avec tiers-payant. La prothèse n’est pas prise en charge [2].

Existe-t-il une liberté du choix du lieu d’installation ?

Dans la convention entre la CPS et les chirurgiens- dentistes libéraux, l’une des clauses concerne le gel des numéros de conventionnement. Chaque praticien libéral en possède un. Ces numéros sont répartis par zones géographiques en fonction des besoins de la population. L’installation n’est donc pas libre.
Cependant, l’une des zones définies par la convention n’est pas gelée (zone 5). L’installation y est donc libre. Cette zone comprend les archipels éloignés [3].

Quels sont les différents modes d’exercice possibles ?

Ils sont détaillés dans la figure 1.

Le salariat est-il possible d’emblée ?
Il n’existe pas de Centres mutualistes ; en revanche, le ministère de la Santé de la Polynésie Française a mis en place un Service d’Hygiène Dentaire qui recrute des praticiens salariés. Ces derniers exercent dans des centres de soins au sein des dispensaires répartis sur l’ensemble de la Polynésie Française [4].
Ces praticiens ont pour mission la prévention et les soins chez les enfants en bas âge, les enfants scolarisés et les personnes handicapées de moins de 20 ans. De plus, dans les îles éloignées, ils prennent en charge les soins sur la population locale [5].
Ce salariat est possible en CDI par la voie d’un concours ou en CDD d’un an renouvelable un an.

Et l’exercice libéral conventionné ?
Pour débuter : remplacement ou collaboration ? Pour le remplacement, les modalités sont les mêmes qu’en Métropole, ce qui signifie que le praticien titulaire ne peut pas exercer en même temps que le remplaçant [2].
En revanche, la collaboration n’est pas possible, car le praticien titulaire ne peut pas partager son numéro de conventionnement. Pour permettre aux jeunes praticiens de débuter leur exercice sereinement, l’Ordre des Chirurgiens-dentistes de Polynésie Française a mis en place le statut de Remplaçant partiel. Il s’agit d’un statut spécifique qui permet au remplaçant de remplacer le titulaire 2 jours par semaine au maximum. Il ne peut pas remplacer plus de deux praticiens. Ce statut s’applique sur le long terme, comme une collaboration ; cet exercice est donc soumis à la TVA [3].
Quelles conditions pour racheter un cabinet ? Compte tenu du gel des conventionnements, c’est une solution de choix pour pouvoir exercer en tant que praticien libéral conventionné. En effet, dans le cadre d’un rachat, le numéro de conventionnement du praticien précédent est récupéré, de même que tous les contrats salariés du cabinet. Le rachat se fait essentiellement sur la base de critères financiers de la valeur d’environ 80 % du chiffre d’affaires basé sur le RIAP (relevé individuel d’activité et de prescriptions). Les murs peuvent êtres inclus ou non [3].

L’exercice non conventionné est-il intéressant pour l’omnipraticien ?
L’exercice non conventionné est moins intéressant, car le patient est remboursé par la CPS sur la base du tarif d’autorité, moins important que le tarif conventionnel [6].
Ainsi, ce mode d’exercice est rare : un seul praticien est non conventionné dans l’ensemble de la Polynésie [3].

La même convention s’applique-t-elle pour un spécialiste (ODF, chirurgie…) ?
Les spécialistes n’ayant pas signé de convention avec la CPS, ils ne sont donc pas concernés par le gel des conventionnements. De ce fait, tous les modes d’exercice sont possibles, y compris la collaboration [3].

Et la pratique hospitalière ?
Il n’existe qu’un seul poste au Centre Hospitalier de la Polynésie Française du Taaone. Il est actuellement pourvu.

Qu’en est-il de la fiscalité ?
Bien qu’il n’existe pas d’impôt sur le revenu à proprement parler, les praticiens libéraux doivent s’acquitter de plusieurs impôts différents selon le statut juridique de leur exercice. Ce sont des impôts progressifs qui restent faibles par rapport à l’impôt sur le revenu appliqué en Métropole [7] (fig. 2).

Faut-il adhérer à une AGA ?
Il n’y a pas d’Association de Gestion Agréée (AGA) en Polynésie. La comptabilité doit être à jour et à disposition de l’administration au besoin [8].

Les cotisations sociales sont-elles importantes ?
Elles sont calculées sur la base de l’ensemble des revenus. La cotisation assurance maladie de la CPS est obligatoire et est égale à 9,54 % du revenu net perçu [7].

Et la retraite ?
La cotisation de retraite à la CPS n’est pas obligatoire. Il faut toutefois y avoir cotisé un nombre suffisant d’années pour pouvoir prétendre à la protection sociale lors de la retraite [3].

Besoin de plus d’informations ?
Le « Guide d’installation du chirurgien-dentiste en Polynésie Française » a pour but de répondre de façon détaillée à l’ensemble des interrogations abordées dans cet article. Il s’agit d’un livret destiné à aider les jeunes praticiens polynésiens qui souhaitent retourner en Polynésie pour exercer, mais il s’adresse aussi à tout praticien souhaitant s’y installer. Il traite des aspects pratiques de l’installation, il est non exhaustif et oriente le lecteur vers la source des informations. Il a été agencé en fonction de codes couleurs présents depuis la table des matières afin de permettre au lecteur de trouver rapidement l’information qu’il recherche.
Il est disponible auprès de :
– l’Université de Bordeaux, UFR des Sciences Odontologiques ;
– l’Ordre des Chirurgiens-Dentistes de la Polynésie Française ;
– le Centre de Consultations Spécialisées en Hygiène Dentaire, ministère de la Santé de la Polynésie Française.

Bibliographie :

1. Institut d’Émission d’Outre-Mer (IEOM). Rapport annuel 2012 de la Polynésie Française, édition 2013.
2. Caisse de Prévoyance Sociale. Convention entre la Caisse de Prévoyance Sociale de la Polynésie Française et le Syndicat des chirurgiens-dentistes libéraux de Polynésie Française, 13 décembre 2013.
3. Entretien avec Dominique Meslin, Président du Conseil de l’Ordre des Chirurgiens-dentistes de la Polynésie Française, 28 novembre 2013, Paris.
4. Jean-François Mercier, responsable du Centre de Consultations Spécialisées en Hygiène Dentaire, Direction de la Santé, ministère de la Santé. Communication personnelle.
5. Arrêté 673 CM du 15 avril 2004 portant sur l’organisation du service de la Direction de la santé de la Polynésie Française, Chapitre 3, Article 9.
6. Caisse de Prévoyance Sociale. Tarifs conventionnels et d’autorité. [Consulté le 14 novembre 2014].
7. Christophe Lefevre, Expert Comptable et Directeur d’Agence exerçant à Tahiti. Thèse. (2014, 24 mars). Communication personnelle.
8. Dominique Meslin, Président du Conseil de l’Ordre des Chirurgiens-Dentistes de Polynésie Française. Thèse. (2014, 12 mars). Communication personnelle.

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