Projet de loi de finances pour 2020 : une baisse de l’impôt sur le revenu ciblée

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  • Publié le . Paru dans L'Information Dentaire n°44 - 18 décembre 2019
Information dentaire
Nous vous proposons de faire le point sur les principales dispositions envisagées par le projet de loi de finances pour 2020, sous réserve d’éventuels amendements pouvant intervenir jusqu’au 31 décembre.

Les deux premiers budgets du quinquennat faisaient la part belle aux entreprises.
Pour 2020, la priorité est aux ménages. En diminuant les impôts des plus modestes, sans accroître la pression fiscale sur les autres catégories, le gouvernement espère répondre aux attentes des « gilets jaunes » et éviter une éventuelle source de mécontentement. Les hausses d’impôts étant rarement populaires.

Après une politique de l’offre, destinée à améliorer la compétitivité des entreprises, le projet de loi finances privilégie une politique de la demande, avec une distribution de pouvoir d’achat supplémentaire afin de tirer la croissance par la consommation.
Les économies budgétaires annoncées cet été attendront…

 

Fiscalité des particuliers

Barème d’imposition

Le barème de l’impôt applicable aux revenus de l’année 2020 comporterait toujours cinq tranches. Cependant, le taux de la première tranche de revenus imposés serait ramené de 14 % à 11 % et les limites des tranches intermédiaires resserrées.

Les limites des tranches du barème de l’impôt sur le revenu sont revalorisées du montant de la hausse des prix attendu pour l’année, soit 1 %.

Le barème serait le suivant pour un quotient familial d’une part, avant application du plafonnement des effets du quotient familial (tableau 1.)

Limites et seuils indexés sur le barème

La revalorisation du barème de l’impôt sur le revenu entraîne la revalorisation automatique d’un ensemble de seuils et limites. On peut noter :

  • la déduction forfaitaire de 10 % pour frais professionnels des salariés et des gérants-associés de sociétés visés à l’article 62 du Code général des impôts (CGI), avec un minimum de 441 € et un plafond de 12 627 € ;
  • la limite de déduction des avantages en nature consentis aux personnes âgées de plus de 75 ans vivant sous le toit du contribuable pour 3 535 € ;
  • le dégrèvement progressif de taxe d’habitation. Le montant du revenu fiscal de référence à ne pas dépasser pour bénéficier en 2020 du dégrèvement serait fixé à 28 732 € pour la première part, 8 722 e pour les deux demi-parts supplémentaires et 6 157 € par demi-part au-delà de la deuxième. L’abattement devient dégressif dès le franchissement du seuil de 27 706 € pour la première part, avec cependant des majorations pour les demi-parts supplémentaires ;
  • le plafonnement des effets du quotient familial pour l’imposition des revenus de 2019. L’avantage en impôt lié à l’application du quotient familial est limité pour chaque demi-part qui s’ajoute aux deux parts pour les contribuables mariés ou pacsés ou à l’unique part pour les autres contribuables (célibataires, divorcés et veufs). Le montant maximal de l’avantage en impôt attaché aux demi-parts ou parts varie, en fonction de la situation du contribuable, de 1 567 € par demi-part pour un couple à 4 879 € par part pour des veufs chargés de famille. Pour des contribuables célibataires, divorcés ou séparés vivant seuls et ayant à charge un ou plusieurs enfants, l’avantage est plafonné à 3 697 € par part ;
  • la déduction des pensions alimentaires versées à des enfants majeurs est limitée à 5 947 € pour l’imposition des revenus de 2019.

Anticipation de la baisse de l’impôt sur le revenu

En principe, l’effet d’une baisse du barème de l’impôt sur les revenus de 2020 ne pourrait être constaté qu’au moment de la liquidation et du paiement définitif de l’impôt, soit en septembre 2021.

Le prélèvement à la source (PAS) de l’impôt sur les revenus de 2020 opéré à compter du 1er janvier 2020 devrait être liquidé, pour la période de janvier à août 2020, d’après l’impôt et les revenus de 2018 et pour la période de septembre à décembre 2020, d’après l’impôt et les revenus de 2019, sans tenir compte de l’avantage fiscal résultant des aménagements du barème pour 2020.

Cependant, afin d’anticiper le bénéfice de cette mesure, le projet de loi prévoit que les prélèvements opérés en 2020 le seraient soit par l’application de taux de PAS de droit commun tenant compte de la baisse d’impôt, soit, le cas échéant, par l’application de grilles de taux par défaut tenant également compte de cette baisse.

Les prélèvements effectués de janvier à août 2020 le seront sur un impôt déterminé en appliquant le barème spécifique suivant aux revenus 2018 (tableau 2).
Aménagement du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE)

À compter du 1er janvier 2020, le CITE serait remplacé par une prime pour les ménages modestes, selon les conditions de ressources de l’Agence National de l’Habitat (Anah). Pour les contribuables non éligibles à cette prime, le CITE serait maintenu.

A compter du 1er janvier 2021, le CITE serait définitivement supprimé et la prime serait étendue à tous les ménages en fonction de leurs revenus.
Le plafond du crédit d’impôt serait fixé, pour une période de cinq ans, à 2 400 € pour une

personne seule et 4 800 € pour un couple soumis à imposition commune. Cette somme serait majorée de 120 € par personne à charge.
Par ailleurs, un montant forfaitaire de prime et de crédit d’impôt serait fixé pour chaque équipement ou prestation éligible, selon l’efficacité énergétique et la chaleur renouvelable produite.

Les chaudières au gaz (y compris celles à très haute performance énergétique) seraient exclues du dispositif, sauf pour les ménages modestes, qui resteront éligibles à la prime pour les chaudières au gaz à très haute performance énergétique.

La prime serait versée par l’Anah. La condition de ressources maximum pour bénéficier du crédit d’impôt pour la transition énergétique (27 706 € pour la première part de quotient familial, majorés de 8 209 € pour chacune des deux demi-parts suivantes et de 6 157 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la troisième) serait supprimée pour les dépenses d’acquisition et de pose de matériaux d’isolation thermique des parois opaques. Le montant du crédit d’impôt serait cependant inférieur à celui accordé aux autres contribuables : 10 €/m2 en cas d’isolation par l’intérieur (au lieu de 15 €/m2) et 25 €/m2 pour l’isolation par l’extérieur (au lieu de 50 €/m2).

Serait par ailleurs institué, sous condition de ressources, un crédit d’impôt spécifique, égal à 150 €/m2, au titre d’un bouquet de travaux payés en 2020 dans une maison individuelle dont la consommation conventionnelle annuelle en énergie primaire, rapportée à la surface habitable du logement, pour le chauffage, l’eau chaude sanitaire et le refroidissement est supérieure à 331 kWh/m2 si ces travaux permettent de réduire cette consommation à 150 kWh/m2 maximum.

Ce crédit d’impôt serait exclusif de tout autre crédit au titre des mêmes dépenses.
S’agissant de la nature des dépenses ouvrant droit à l’avantage fiscal, des aménagements ont notamment été apportés pour les dépenses relatives aux foyers fermés, aux inserts de cheminées intérieures fonctionnant au bois ou autres biomasses ainsi qu’aux pompes à chaleur.

Finalisation de la réforme de la taxe d’habitation

Institué par la loi de finances pour 2018, le dégrèvement de la taxe d’habitation afférente à la résidence principale, soumis à une condition de ressources, a été précisé.

Les contribuables éligibles ont pu bénéficier d’un dégrèvement de 30 % en 2018 et de 65 % en 2019. Le taux du dégrèvement sera porté à 100 % en 2020 pour les contribuables dont le revenu fiscal de référence de 2019 n’excède pas le seuil évoqué ci-dessus de 28 732 €.

Afin que les contribuables encore soumis à la taxe d’habitation ne soient pas pénalisés dans le cas où les collectivités augmenteraient leur taux d’imposition, il est prévu de geler toute augmentation de taux ou de valeur locative en 2020.

À compter de 2021, l’ensemble des redevables bénéficieraient d’une exonération de la taxe d’habitation afférente à leur habitation principale.

Pour les contribuables ne remplissant pas les conditions de ressources, l’exonération serait égale à 30 % de la cotisation de l’année d’imposition en 2021 et de 65 % en 2022.

La taxe d’habitation serait totalement supprimée en 2023 pour les résidences principales, quel que soit le revenu du contribuable. Elle serait en revanche maintenue pour les autres locaux sous l’appellation « taxe d’habitation sur les résidences secondaires et autres locaux meublés non affectés à l’habitation principale » (THRS).

Dans les zones tendues, la majoration de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires resterait applicable sur décision des communes. Seraient également maintenues les taxes sur les logements vacants.

À compter de 2023, une nouvelle obligation déclarative serait mise à la charge des propriétaires, afin de permettre à l’administration d’établir la taxe d’habitation et la taxe sur les locaux vacants. Les propriétaires de locaux affectés à l’habitation devraient ainsi informer l’administration de la nature de l’occupation des locaux s’ils s’en réservent la jouissance. Si les locaux sont occupés par des tiers, les propriétaires seraient tenus de déclarer l’identité du ou des occupants des locaux.
Les mesures envisagées étant de nature à affecter les ressources des collectivités locales, diverses règles sont prévues, notamment une réorientation de la taxe foncière des départements vers les communes.

Fiscalité des entreprises

Impôts sur les sociétés

Les précédentes lois de finances prévoyaient un abaissement progressif de l’impôt sur sociétés jusqu’en 2021 en fonction du chiffre d’affaires. L’ensemble des sociétés devant être taxées à 25 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2022.

Le rythme de la baisse de l’IS serait à nouveau modifié pour les grandes entreprises.

Le projet propose d’aménager la trajectoire de la baisse du taux normal d’impôt sur les sociétés pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est égal ou supérieur à 250 millions d’euros. Cette modification n’aurait d’incidence que pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2020.

Aménagement de la déduction pour mécénat d’entreprise

Le régime du mécénat d’entreprise serait modifié en abaissant le taux de la réduction d’impôt et en instaurant une limite des dépenses.

Actuellement, les entreprises peuvent bénéficier d’une réduction d’impôt sur les bénéfices égale à 60 % des dons, pris dans la limite de 10 000 e ou de 5 pour mille du chiffre d’affaires lorsque ce dernier montant est plus élevé.

Le projet de loi prévoit de baisser de 60 % à 40 % le taux de la réduction d’impôt pour les versements supérieurs à 2 millions d’euros effectués au cours des exercices clos à compter du 31 décembre 2020.

Toutefois, les versements effectués au profit d’organismes sans but lucratif qui procèdent à la fourniture gratuite de repas à des personnes en difficulté, qui contribuent à favoriser leur logement ou qui procèdent, à titre principal, à la fourniture gratuite de certains soins à ces personnes, continueraient de bénéficier de la réduction de 60 % et ne seraient pas retenus pour le plafond de 2 millions.

Ces dispositions ont été prises à la suite des polémiques suscitées par les promesses de versements de certains dirigeants d’entreprises après l’incendie de Notre Dame. Contrairement à une idée reçue, le crédit d’impôt définitif perçu par les donateurs ne s’élève pas à 60 %, mais à 26,67 % pour la plupart des sociétés (les dons ouvrant droit au crédit d’impôt ne sont pas déductibles du résultat fiscal et supportent l’impôt sur les sociétés). L’État est en définitive moins généreux qu’il n’y paraît.

Transposition de la directive européenne sur le commerce électronique

Les règles relatives à la TVA sur les opérations de vente à distance seraient modifiées à compter du 1er janvier 2021.
Ces modifications concerneraient les ventes à distance de biens intracommunautaires ou importés.

Actuellement, les assujettis qui vendent et expédient des biens à destination de particuliers établis dans d’autres États de l’Union européenne doivent payer la TVA dans l’État membre de départ du transport des biens tant que le chiffre d’affaires afférent aux ventes à distance à destination du pays considéré n’a pas atteint un seuil annuel fixé à 100 000 € hors taxe par la directive TVA et qui peut être ramené à 35 000 € par l’État concerné (ce qu’a fait la France). Si ce seuil est dépassé ou si l’assujetti opte en ce sens, la TVA est due dans l’État membre de destination des biens.

A compter du 1er janvier 2021, un seuil de chiffre d’affaires unique de 10 000 € s’appliquerait au niveau l’Union européenne, à partir duquel la taxation de la vente à distance aurait lieu dans le pays du consommateur final.

Un régime particulier pour les ventes à distance de biens importés serait créé. Il s’appliquerait aux biens provenant de pays hors Union européenne.
Les plateformes en ligne facilitant les ventes à distance par l’utilisation d’une interface électronique telle qu’une place de marché, une plateforme, un portail ou un dispositif similaire deviendraient redevables de la TVA.

Ces dispositions s’appliqueraient quelle que soit la valeur intrinsèque de la vente à distance.
Un dispositif de solidarité en paiement de la TVA a également été prévu pour certaines plateformes en ligne, à compter de 2020. En l’absence de respect des règles, la plateforme serait portée sur la liste des opérateurs non coopératifs.

Exonérations facultatives de CET et de taxe foncière pour les commerces de proximité

Le projet de loi prévoit la création de nouvelles exonérations facultatives de cotisation économique territoriale (CET, qui regroupe la contribution foncière des entreprises-CFE et la contribution sur la valeur ajoutée-CVAE) et de taxe foncière sur les propriétés bâties en faveur des activités commerciales situées dans des communes rurales isolées et des activités artisanales ou commerciales situées dans les zones de revitalisation des centres-villes.

Contrôle fiscal

Les opérateurs de plateforme internet sont soumis à un certain nombre d’obligations d’information, notamment celles d’adresser à l’utilisateur et à l’administration un récapitulatif annuel des transactions réalisées par son intermédiaire, ou de contribuer au respect des obligations fiscales de leurs utilisateurs en matière de TVA.

Le projet de loi renforce les sanctions en cas de manquement en leur donnant un caractère public sur le site de l’administration.
L’administration aurait ainsi la possibilité de publier l’identité de l’opérateur de plateforme sur son site.

Fiscalité des véhicules

L’ensemble des règles afférentes aux véhicules terrestres serait modifié afin de respecter les nouvelles méthodes européennes de détermination des émissions de dioxyde de carbone (CO2) et de durcir la fiscalité sur les véhicules (taxe sur les véhicules de société, malus automobile, taxes sur les certificats d’immatriculation…).

Le montant de la fraction d’amortissement des véhicules de tourisme déductible des résultats des entreprises serait modifié pour les véhicules qui relèvent du nouveau dispositif d’immatriculation. Le plafond de déductibilité pouvant aller de 30 000 € pour les véhicules émettant moins de 20 g de CO2 par kilomètre à 9 900 € pour les véhicules émettant plus de 160 g.
La taxe due lors de l’immatriculation des véhicules les plus polluants (ou malus) serait augmentée. La dernière tranche du barème pour un taux de CO2 supérieur à 172 g/km s’élèverait à de 12 500 € (en 2019, la taxe maximale s’élevait à 10 500 € pour les véhicules à partir de 191 g/km).
Le malus serait dû au titre de la première immatriculation en France d’un véhicule de tourisme. En seraient exonérés les véhicules accessibles en fauteuil roulant et les véhicules acquis par une personne titulaire d’une carte d’invalidité (ou dont un enfant à charge de son foyer fiscal en est titulaire).

En baissant les impôts, le gouvernement espère répondre à la « crise des gilets jaunes » et redonner de la confiance.

Les quelques points de pouvoir d’achat octroyés réussiront-ils à effacer les inégalités ou injustices ressenties par certains, notamment dans les domaines de la santé, de la protection sociale ou de l’accès aux services publics ?

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