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Information dentaire

L'Information Dentaire n°21 - 26 mai 2021

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Éditorial

Que faire ? I Lire ci-dessous >
Michel Bartala

Avant-propos

Rassurer, rationaliser, expliquer… I Lire ci-dessous >
Jean-Christophe Fricain

Actualités

Revue de presse
Antirésorptifs et risques d’ostéonécroses : que savent les praticiens ?
Pascal De March

Presse médicale spécialisée
Philippe Léonard

Actualité hebdo
Nicolas Fontenelle

Formation – Spécial Antirésorptifs osseux

Pharmacologie pratique des antirésorptifs osseux
Philippe Lesclous

Les bisphosphonates et le dénosumab sont-ils vraiment utiles en rhumatologie ?
Nadia Mehsen-Cetre, Itsaso Odriozola, Olivia Kérourédan, Raphaël Devillard

Les bisphosphonates et le dénosumab sont-ils vraiment utiles en cancérologie ?
Anne-Gaëlle Chaux, Mehdi Brahmi

Place des bisphosphonates dans le traitement des parodontites : revue de littérature
Rawen Smirani

Ostéopétrose et pycnodysostose, un modèle physiopathologique d’ostéonécrose des mâchoires induite par les antirésorptifs osseux ?
Mathilde Fénelon, Sylvain Catros, Jean-Christophe Fricain

Comment prévenir les ostéonécroses des maxillaires imputables aux antirésorptifs osseux ?
Guillaume Penel

Comment traiter les ostéonécroses des mâchoires ? Traitement médical ou chirurgical ?
Jean-Hugues Catherine, Romain Lan, Fabrice Campana

Découverte

Art

Tous déchaînés…
Thierry Leroux


ÉDITORIAL

Que faire ?

Je regarde cette radio panoramique depuis 15 minutes, et je n’avance pas dans ma décision. L’extraction de cette seconde prémolaire mandibulaire ne semble pas très compliquée, mais je bloque. Cette prémolaire appartient à une patiente avec une ordonnance longue comme une liste de courses un samedi. Il faut trouver une solution efficace limitant les ennuis : la fameuse notion bénéfice/risque. Or, comment bien évaluer la prise de risque ?

Ce type de question tourne souvent dans la tête des praticiens, soucieux de trouver la meilleure solution pour leurs patients. Dans la pratique quotidienne de nos cabinets dentaires, l’espérance de vie augmentant, nous sommes de plus en plus souvent confrontés à des patients « polymédiqués » engendrant des décisions thérapeutiques parfois embarrassantes et nécessitant des connaissances médicales. La peur de prendre une décision vient souvent d’une méconnaissance partielle ou totale des risques encourus. Dans un article, Franck Renouard aborde de façon optimale la problématique de la décision et du facteur humain. Sa comparaison avec le monde aéronautique est des plus pertinentes : prévenir en évaluant la situation, puis agir en conséquence. Dans cette évaluation préalable, le processus de réflexion peut et doit faire appel à la recherche d’informations, à la quête de connaissance.

Il y a quelques années, lors de la parution des premiers articles relatant des « chimio-nécroses » maxillaires à la suite d’avulsions chez des patients sous bisphosphonates, la crainte s’est emparée de notre profession, de nombreuses patientes souffrant d’ostéoporose étant alors traitées avec cette molécule qui semblait interdire les actes invasifs de chirurgie dentaire. Puis, la connaissance avançant, les risques se sont faits plus précis, et la décision plus réfléchie. Ce numéro, superbement coordonné par Jean-Christophe Fricain, vous apporte les dernières connaissances sur les traitements antirésorptifs, donc plus de sérénité dans le traitement des patients concernés. Si la précaution doit rester présente, la décision doit être pertinente. Nous avons vécu pendant un an avec une peur générant des précautions extrêmes face au coronavirus. Au fil de l’acquisition des connaissances, nos appréhensions ont été réduites et les précautions précisées. Ainsi, comme vous le lirez dans les actualités, si nous devons continuer à protéger patients comme soignants, des sources de contamination considérées comme importantes sont maintenant à relativiser.

La connaissance comme protection, voilà ce nous souhaitons vous proposer.

Bonne lecture.

Michel Bartala, Rédacteur en chef


Avant-propos

Rassurer, rationaliser, expliquer…

En 2003, Marx décrivait dans une publication princeps 36 cas d’ostéonécrose des mâchoires imputables au pamidronate et au zolédronate, deux bisphosphonates azotés [1]. Cette série de cas fut inaugurale d’un stress collectif relayé par les médias et partagé par les chirurgiens-dentistes et les patients. Quelques années plus tard, un anticorps monoclonal, le dénosumab, prescrit dans des indications similaires à celles des bisphosphonates, induisait aussi des ostéonécroses des mâchoires.

La pharmacologie des antirésorptifs osseux est la base indispensable à connaître pour maîtriser les effets indésirables de ces traitements et leur action thérapeutique. Nous vous proposons dans cette édition un article entièrement consacré à la pharmacologie pour faire le point sur ces traitements, leurs similitudes et leurs différences qui impactent la prise en charge des patients.

L’objectif de ce numéro est en effet de faire le point sur les antirésorptifs osseux et leurs complications orales, mais aussi et surtout de rassurer les chirurgiens-dentistes afin qu’ils puissent rationaliser le discours qu’ils tiennent à leurs patients. Le service médical rendu par ces traitements est important. Des études en rhumatologie ont rapporté une diminution de 30 % du taux de mortalité dans la cohorte traitée par bisphosphonate par rapport au placébo [2]. Ces chiffres doivent inciter le chirurgien-dentiste à expliquer aux patients l’intérêt de ces traitements et ne pas se focaliser sur le risque d’ostéonécrose. L’intérêt des antirésorptifs en rhumatologie et en cancérologie sera ainsi exposé au travers de deux articles synthétiques.

De nombreuses publications ont étudié l’intérêt des bisphosphonates en parodontologie comme traitement adjuvant pour limiter la perte osseuse. Une mise au point sur ce thème est développée dans ce numéro spécial.

L’ostéonécrose des mâchoires d’origine médicamenteuse est aujourd’hui mieux connue. Nous proposons de revisiter la physiopathologie au travers de l’ostéopétrose et de la pycnodysostose, deux maladies rares ostéocondensantes qui se compliquent de nécroses similaires à celles observées avec les antirésorptifs osseux. L’épidémiologie, la prévention et le traitement de ces ostéonécroses sont mieux codifiés aujourd’hui. Le rôle central du chirurgien-dentiste dans la chaîne diagnostique et thérapeutique est largement détaillé dans deux articles consacrés à la prophylaxie et à la thérapeutique médicale ou chirurgicale des ostéonécroses.

Nul doute que ce numéro spécial permettra une mise au point claire, théorique et pratique sur un sujet qui, dix-huit ans après les premiers rapports de cas, inquiète encore les chirurgiens-dentistes. En espérant qu’à la fin de la lecture, l’inquiétude se soit transformée en sérénité !

Jean-Christophe Fricain
Service de chirurgie orale, Pôle d’odontologie
et santé buccale, CHU de Bordeaux
Coordinateur scientifique du numéro